Sainte Thérèse d’Avila (1515-1583), « mère des spirituels »

11 octobre 2023

L’Eglise fait mémoire le 15 octobre de « la Madre », patronne de la vie spirituelle et de l’Espagne, réformatrice du Carmel, « fille de l’Église » et « docteur de la foi ».

Thérèse d’Avila est avant tout « fille de l’Église » et « mère des spirituels  ». Nous retrouvons cette inscription sur le socle de sa statue dans la basilique Saint-Pierre, à Rome : « Mater spiritualium ». Pédagogue hors pair, la Madre témoigne de notre vocation commune à vivre une relation d’amour authentique avec Dieu et les autres. Elle a laissé des écrits de feu dans lesquels nous entendons battre son cœur.

Le désir de Dieu

Thérèse est née le 28 mars 1515 à Avila. Elle est la cinquième d’une famille de petite noblesse qui comprendra douze enfants. Très jeune, elle rêve d’épopées chevaleresques et s’enfuira avec son frère afin d’y trouver le martyre et, par le fait même, de voir Dieu au ciel. « Je veux voir Dieu », s’écrit-elle.

Malgré son goût pour la vie mondaine, car elle est une jeune fille brillante et admirée de tous, elle décide tout de même, à l’âge de vingt ans, d’entrer au carmel de l’Incarnation, à l’ombre des remparts d’Avila, où vivent 180 religieuses qui pratiquent la règle d’une manière mitigée. Elle devient Thérèse de Jésus.

Thérèse passera 27 ans dans cette communauté, où elle est initiée à la tradition du Carmel. L’adaptation est difficile, ce qui ne l’empêche pas de faire profession le 2 novembre 1537. Elle s’engage sur les chemins de l’oraison, non sans lutter avec elle-même.

Pour elle, l’oraison devient le lieu de l’amitié et de l’intimité avec le Christ. Elle donne cette définition célèbre : «  Ce n’est pas autre chose qu’une amitié intime, un entretien fréquent, seul à seul, avec celui dont nous nous savons aimés » (Livre de la vie 8, 5).

Le combat intérieur

Souvent malade, elle se repose dans sa famille. Distraite par des amitiés mondaines, elle abandonne l’oraison et pendant douze ans, elle expérimente cette division intérieure qui rend difficile la fidélité à l’oraison.

La lecture des Confessions de saint Augustin va la marquer et la conduit à sa deuxième conversion, à quarante ans, où elle médite sur l’humanité de Jésus. Désormais, elle se laissera envahir par l’amour divin.
La fécondité de son expérience s’exprimera par des fondations et par l’écriture qui n’ont pour but que de susciter l’oraison.

En 1562, Thérèse fonde à Avila, non sans obstacles, le petit couvent de Saint-Joseph. Elle y restera jusqu’à l’été 1567. Cette première fondation jette les bases d’un retour à la règle primitive du carmel, à l’exemple du prophète Élie, où tout doit favoriser le recueillement. C’est le début des Carmélites déchaussées, comme le symbolise l’absence de chaussures.

Sur les routes d’Espagne

Thérèse écrira, sur l’ordre de ses conseillers spirituels, l’histoire de sa vie qui sera plus qu’une autobiographie, achevée en 1564. La réformatrice témoigne des miséricordes du Seigneur dans sa vie. Le Chemin de la perfection, où elle définit la manière de prier et de vivre des carmélites. Le Christ est au centre de ce livre, c’est lui le maître de la prière qui prie avec nous le Notre Père.

La recluse sera tirée de sa retraite d’Avila pour s’engager dans l’action. Elle parcourra les mauvaises routes de Castille et d’Andalousie pendant vingt ans pour fonder dix-sept monastères. La réforme s’étendra ensuite en Italie, en France et en Europe. L’ancien Carmel d’Avignon fut un des premiers carmels réformés, fondé en 1612 par 3 carmélites de Gênes.
La quête mystique de la Madre répond à l’aventure intérieure que plusieurs veulent vivre, dont un jeune carme, qu’elle rencontre à Salamanque en 1567 : qui prendra le nom de Jean de la Croix. Thérèse lui confie la réforme de son ordre. Ces deux écrivains mystiques, nourris d’oraison et d’amour du Christ, vont enflammer l’Espagne et le monde. Leurs écrits comptent parmi les chefs-d’œuvre de la spiritualité chrétienne.

Le cardinal Ratzinger a affirmé dans « le sel de la terre » « Ce dont nous avons réellement besoin, ce sont des gens qui sont intérieurement habités par le christianisme, le vivent comme un bonheur et un espoir et sont ainsi devenus des âmes aimantes. C’est cela que nous appelons des saints. Les vrais réformateurs de l’Église, grâce auxquels elle est redevenue plus simple et a ouvert ainsi de nouveaux accès à la foi, ont toujours été les saints. »

Le château intérieur

En 1571, Thérèse revient à son ancien carmel de l’Incarnation d’Avila, où elle est imposée comme prieure. Elle écrit les Fondations, puis le Château Intérieur, son joyau, écrit d’un jet, où Dieu a la première place au centre de l’âme aux sept demeures. Thérèse y parle de mariage spirituel.

 Épuisée et malade, elle meurt le 4 octobre 1582 à Alba de Tormes. Elle peut enfin voir Dieu. Elle était passée du « je veux » à ce que « Dieu veut ». On a retrouvé ce billet dans son bréviaire :

Que rien ne te trouble,
Que rien ne t’effraie ;
Tout passe.
Dieu ne change pas,
La patience obtient tout ;
Celui qui a Dieu ne manque de rien.
Dieu seul suffit (Poésie 9).

Thérèse d’Avila est canonisée en 1622 par le pape Grégoire XV et déclarée première femme docteur de l’Église en 1970 par Paul VI. L’Église célèbre sa mémoire le 15 octobre.

D’après le site « Le Carmel en France »