Quelle sorte de catho êtes-vous ?

3 mars 2017

Extrait du Bloc-Notes de mars 2017

Faites-vous partie des 6% qui participent à la manif pour tous ou des 73% qui n’ont pas souhaité y participer  ? La fréquentation de la messe dominicale servait hier de thermomètre pour trier les cathos. Vision bien cléricale s’il en est parce qu’elle tournait autour de la vision dominicale du prêtre.
Les pratiquants de chaque dimanche ne représentent que 1,8% de la population française. La moyenne d’âge est de 70 ans, ce qui signifie que la moitié encore est plus âgée. Détaillons qui sont les cathos.

Les saisonniers fraternels représentent 26% d’entre nous  ; ils sont là quand ça carillonne, à Pâques, à Noël… Ils se savent baptisés. Ils contribuent financièrement et sont sensibles à la dimension hospitalière de leur appartenance au christianisme. Ils ont admiré l’abbé Pierre et apprécient le pape François.

Les festifs culturels sont les plus nombreux :45%. Leur religion est patrimoniale et les grands rites de passage comptent beaucoup. Il faut que les enfants soient baptisés, éventuellement qu’ils fassent leur communion, qu’ils se marient à l’église et qu’ils ne soient pas enterrés comme des chiens. Là les grands-mères ont encore une voix dominante. Ils sont en toutes choses à l’image de la société sécularisée.

Les observants, pour le coup étaient dans la manif pour tous. Ils représentent 7% des cathos, articulés sur la conviction du salut apporté par le Christ. Ils choisissent leur paroisse par affinité, aiment les belles liturgies, l’école privée, le scoutisme, les pèlerinages et l’adoration du Saint-Sacrement Ils sont plus présents dans la bourgeoisie que dans les milieux populaires.

Les conciliaires ont le regard tourné vers l’exclusion sociale, ce sont d’abord des humanistes et pas des dévots  ; si on peut les trouver pèlerins à Lourdes et il est beaucoup dans toutes les instances diocésaines. Ils représentent 14% des cathos, sans marquage sociologique particulier. Très pratiquants, comme les observants, ils sont le plus fort soutien du pape François.

Les inspirés représentent 4%, ils portent la grâce d’une conversion. Jésus est une personne rencontrée, hier, aujourd’hui, demain. Souvent il se sont attachés à une communauté nouvelle et iront volontiers vers une évangélisation prosélyte. D’autres peuvent être convertis comme eux et construire leur vie autour.

Les émancipés représentent les 4% restants : Jésus a libéré l’homme de ce qui lui faisait perdre sa dignité. Un catholique doit être responsable de ses actes et lutter pour la justice sociale. L’émancipé n’est guère pratiquant et vitupère contre l’église trop proche des valeurs politiques de la bourgeoisie, vitupère à l’adresse du pape François, pas assez tranchant sur l’ouverture aux femmes, sur la place faite à l’homosexualité. Ses engagements sont le plus souvent non religieux. Vous les trouvez souvent dans le scoutisme, au CCFD, dans les mouvements d’Action Catholique et dans les ONG.

Le travail d’un évêque, d’un prêtre, d’un conseil paroissial est de faire vivre ensemble ces cathos qui ne sont ni distraits, ni centrés sur les mêmes choses. En vérité depuis la chaire il ne reste dans l’auditoire que des inspirés qui attentent que transpire la conversion du prêtre, des conciliaires qui attendent une traduction dans l’action, et des observants qui veulent goûter à la prière  ; les autres (75 % des cathos) ne sont pas là, si c’est un dimanche «  ordinaire  ».

Imaginez une assemblée de 100 personnes, un petit matin d’hiver : il s’y trouverait 16 inspirés, 28 observants et 63 conciliaires.

Si vous cherchez à qui vous ressemblez, vous aurez peut-être à nuancer votre similitude à deux profils proches (émancipé/conciliaire ou observant/inspiré). Cela dépend du moment de votre vie de foi. Votre prêtre peut se révéler d’une autre catégorie que la vôtre. Amusez-vous à le repérer.

Jacques Mallon est le prêtre d’une grosse paroisse canadienne (2000 pratiquants à chaque dimanche). Il a travaillé avec des outils de sociologue pour essayer de comprendre ce qui ne fonctionnait pas dans une panne, maintenant prévisible et répétée, celle du lien à une communauté. Il a écrit un manuel de survie pour les paroisses.

La question assommante posée par l’absence des 75% des «  brebis  » serait celle de l’inexpérience de l’appartenance profonde à une communauté, qui touche d’abord bien paradoxalement les pratiquants. Ce sera le propos d’un prochain article dans le Bloc-Notes.

Gilles Gueniot